dimanche 30 juin 2013

Dimanche matin 23 juin

auf Deutsch...

Rendez-vous à 7h devant la land cruiser de Jo pour aller au culte de Heal Africa (HA).

On rejoint le centre ville par une route complètement cassée, avec des pierres de rocher qui émergent, et parfois du bitume cassé. Ça nous secoue tellement que j'ai peine à supporter ! Cette route avait été asphaltée. Mais les représentants du gouvernement ont décidé de l'améliorer encore; pour cela il fallait casser le bitume avant de remettre une nouvelle couche plus solide. On casse d'abord; puis vient la période des élections, et l'argent prévu pour la route est mangé pour la campagne électorale...

Le lieu de culte est appelé Tabernacle", pour ne pas faire "église- nouvelle dénomination", et il se passe de 7h30 à 9h, pour ne pas faire concurrence aux églises de la ville, où chacun peut aller ensuite s'il veut. Pour ne devoir rien à personne, ce "tabernacle" a été construit aux frais des Lusi. (Les "donateurs" ont toujours des exigences…).

A côté se trouve le centre de réhabilitation des femmes violées, opérées et en convalescence. Après leur opération (fistules), elles restent là quelques mois, apprennent des rudiments de métiers, couture, cuisine, jardinage (en sacs troués), bientôt poterie avec Thérèse. Elles apprennent "les bonnes manières", à lire, à se maquiller… Quand elles retournent au village, elles ont acquis de la dignité, notoriété et sont respectées. Elles enseignent alors aux autres ce qu'elles ont appris ici et se "débrouillent" mieux qu'avant. Ce centre, comme tout l'hôpital, le tabernacle et les autres bâtiments a été reconstruit sur les anciens bâtiments détruits et engloutis sous la lave sortie de l'éruption du volcan en 2002.

Des trous de 2 ou 3 mètres cubes ont été creusés dans la lave (à la pioche ou au marteau piqueur) et remplis de terre. Des palmiers ont poussés maintenant et d'autres sont en préparation.

Salutations du pasteur Bizzi, un des trois aumôniers, inscrit au CPT, ainsi que de quelques médecins et leur famille.

Première partie du culte très émouvante pour moi: des chorales se succèdent, comme d'habitude, mais surprise: il y a
  • la chorale des enfants des rues qui chantent et dansent du rap: «quand nous arriverons au ciel et qu'on dira "qui sont ceux-là ?" on dira que "ce sont ceux qui ont cru en Jésus». Des jeunes entre 12 et 20 ans qui ont reçu une chemise identique colorée en signe de leur dignité (humaine), qu'ils sont honorés comme les autres. C'est le problème de Jo, car ces jeunes qui sont accueillis dans l'église, certains se tournent vers Dieu, mais n'ont pas pour autant de moyen de vivre; et parfois ils se battent encore dans les rues pour survivre.
  • La chorale des enfants sans pères qui chantent, dansent et font des chorégraphies magnifiques sur une musique chrétienne populaire enregistrée. C'est les enfants "de la forêt", dont on ignore les pères, et dont les mères ne sont pas très stables ni guère à la maison (8-15 ans ?)
  • La chorale des…sourds muets ! Auparavant ils étaient assis en groupe (une trentaine) et devant eux une femme traduit toutes les paroles et les chants en langage des signes. Cette chorale suit le rythme d'une batterie (certains entendent le rythme, les autres suivent des gestes appris en commun). La femme qui traduisait en signes, fait maintenant l'inverse, elle dit en swahili au micro ce que les choristes veulent exprimer: "l'amour dont nous avons été aimés, recevez-le vous aussi; soyez bénis par la bénédiction dont nous avons été gratifiés". C'est Jo qui me traduit.
Beaucoup de joie exprimée. Le principe de base, de Heal Africa (Jo), c'est que le signe de la santé d'une entreprise se lit dans le sort qu'on réserve aux plus démunis. "C'est ceux-là qui sont l'objet de notre plus grand soin, que l'on cherche à honorer en premier".

Puis on m'accueille ainsi que deux médecins de HA, dont l'adjoint de Jo (son futur successeur) qui rentrent d'une tournée de trois semaines en Province Orientale où ils ont fait beaucoup d'opérations. Les nombreux enfants sortent alors pour l'école du dimanche. Reste une assemblée composée essentiellement de (ex-?) malades, quelques chaises roulantes, des cannes, de "petites" gens, tous accueillis et honorés. Prédication. Fin à 9 h précises.

A la sortie, on offre à boire et à manger à ceux qui n'ont rien, qui le désirent.

Retour dans ce merveilleux cadre de la grande parcelle des Lusi. Un petit-déjeuner nous attend, en self service pour les trois hôtes. Un potage sera servi aussi en self service dès midi et un souper copieux à 19h. Jo s'est "reclu" pour toute la journée, comme chaque dimanche, dans son appartement, pour s'y renouveler en solitude devant Dieu.

J'arrive à atteindre Tsongo, mon collègue du CPT, au téléphone. Il est encore à Béni (un des trois hôpitaux qu'il dirige avec Bunia et Nyankunde). Il confirme que son vol aura lieu à 15h30. Nous irons le chercher à l'aéroport à 17h. J'écris ces lignes dans ma très grande chambre dont la façade principale est vitrée et donne sur une véranda face au lac qui s'étend dans toute sa longueur vers le sud (mais le soleil est au nord !); comme une mer; d'un bleu intense, et assez agitée.

Il y a bien sûr panne de courant! Mais je peux aller recharger dans le bâtiment des hôtes sur un réseau solaire! Je suis donc relié à skype et
mon N° de téléphone est 00243 970 330 276.

jeudi 13 juin 2013

De la décision …
(à travers les incertitudes) …
jusqu'à à la réalisation

Je m'envole le 21 juin, via Kigali pour Goma, en vue d'y co-animer une nouvelle session de formation pour les aumôniers d’hôpitaux. Cette région riche en mines, frontalière avec le Rwanda, vit dans une grande instabilité.  Alors que le secrétaire général du l’ONU Ban Ki-moon s’y rendait  pour "imposer" la paix, une nouvelle flambée de violence s’est réveillée le 20 mai et les journaux annonçaient : «A Goma, en RDC, on se prépare au pire : après plusieurs mois de trêve, les combats ont repris entre l'armée congolaise et les rebelles».

Heureusement ce ne fut qu’une poussée de fièvre qui est rapidement retombée et le calme est revenu.

Nous nous sommes alors posé la question s’il était raisonnable de maintenir notre projet de formation dans ce contexte.

La première voix à résonner est venue depuis Goma-même, de la part du médecin, ami proche, qui nous accueille :
«Quand il y a des troubles, quand les choses vont mal comme à Ninive, dans le chaos: Dieu envoie son Saint-Esprit pour y mettre de l'ordre: c'est là où Dieu envoie les chrétiens! Dieu vous a déjà planifiés pour Goma pour ce temps prévu. La paix est totale à Goma».


La deuxième voix est venue des collègues qui m'accompagnent et, qui vont faire à Goma leur première expérience de formateur en formation :
«
Je me sens dans l’obligation de faire quelque chose, parce que c’est la responsabilité de l’église. Les serviteurs de Goma en ont grandement besoin ! Comme le souligne le dossier "Laissez-nous vivre!":  «l’église est convoquée au rendez-vous du risque».
Mes collaborateurs: Joël Kuvuna, aumônier universitaire (près de Kinshasa) et Tsongo Kasereka, aumônier et Directeur d'hôpital (Bunia Nyankunde), superviseurs en formation qui animent le CPT de Goma avec moi
Une troisième voix, est venue de Kinshasa, de la part de l’aumônier national, Alfred Mbuta. Après deux jours de prière à l'écoute de la perspective divine, organisés avec un frère intercesseur, il écrit un mail à 2h38:

"Il est une heure cinq du matin, c'est à dire en pleine nuit nous venons de traverser la journée dans la prière ; et le Seigneur vient de nous répondre pour aller à Goma. Il nous a donné cette recommandation, voilà il ne fait l'ombre d'aucun doute, ni de crainte".
Pour ma part, depuis la Suisse, j’ajoute avec conviction ma voix à la leur et me réjouis de la partie que Dieu nous donner à jouer ensemble. Et c’est même passionnant d’entendre encore d’autres voix, comme celle de la journaliste Colette Braekmann:
"Dans cette région des Grands Lacs, (Kivu, Est du Congo) où tous rêvent de la paix et préparent la guerre, il faut avoir la foi chevillée au corps pour croire que les communautés sont destinées à s’entendre, que le pire peut-être conjuré et que le meilleur est à venir, peut-être plus vite qu’on ne l’imagine…"
Il n'en reste pas moins vrai que plusieurs candidats ont encore quelques craintes à envisager de se déplacer de chez eux jusqu'à Goma (+/- 500 km); d'autres doutent encore de trouver les moyens financiers… Nous verrons sur place !

Nous sommes reconnaissants de pouvoir vous associer à ce beau défi.

Pour en savoir plus sur la région des Grands Lacs, je vous recommande de consulter:
Jean-Claude Schwab


Alfred Mbuta, Directeur national des aumôneries et Dr Jo Lusi de Goma, en noble compagnie de Ban Ki-moon en visite dans son hôpital à Goma, le 23 mai 2013.