Durant ces 7 semaines de vie communautaire en monastère, les huit candidats à la formation de superviseurs- formateurs ont eu le temps d’établir des liens mutuels inaltérables et de saisir pleinement les enjeux de cette formation pour l’accompagnement existentiel, spirituel dans les hôpitaux, les églises. Avec l’initiateur du projet le pasteur Alfred Mbuta
ils forment une nouvelle et solide équipe, porteuse d’une vision large et pénétrante, déterminée à promouvoir cette formation qu’ils ont perçue comme décisive pour leur vie.
Nous les présentons brièvement, ceux qui sont devenus nos compagnons d’œuvre, tous pasteur ou prêtre :
Benoît Ngoyi Kitenge, 54 ans
Figure de prophète, fondateur d’une nouvelle église, reliée à d’autres, ancien Président d’Eglise, il découvre l’art de ne plus donner de conseils, mais de susciter les ressources de son vis-à-vis.
Bylord Ilanga, 46 ans
Tempérament et profil de chef d’Eglise et pionnier-missionnaire dans les endroits les plus reculés du centre du pays. Il se réjouit de transformer ses faiblesses en capacités.
Cyrille Ikomba,44 ans
Prêtre, plein d’humour, capable de rire des autres et de lui-même. Il découvre la liberté de lâcher des fonctionnements invétérés, et d’accueillir les nouvelles capacités qui germent de l’intérieur.
Dido Makila, 52 ans
Il tient à pratiquer ce qu’il apprend. Il est en quête de compétences … qu’il a déjà mises en œuvre dans son foyer (son épouse faisait partie des stagiaires CPT), avec son conseil paroissial et ses collègues collaborateurs
Grégoire Ntobo, 46 ans
Un bon gestionnaire au cœur tendre et serviable dans son église et aussi au sein de notre groupe. Il a le don de se trouver au bon moment au bon endroit. Sa nouvelle capacité de décision et de prise de risque (acquise l’an passé) lui ouvre le chemin d’expériences bouleversantes
Joel Kuvuna, 38 ans
Le plus jeune du groupe, petit de taille, il a une voix formidablement puissante quand il chante. Sa profonde perception des enjeux de cette formation lui ouvre de nouveaux modes d’être et champs d’action ; elle aiguise son écoute et son discernement!
Samuel Aluta, 57 ans
Quoique « Monseigneur », responsable des églises protestantes de toute une Province, il n’a pas hésité à se remettre au rang des apprenants. Plein de douceur, humble, toujours (et parfois trop) à l’écoute des autres, il a goûté au plaisir de s’exposer dans ses relations et prendre les risques de la foi.
Tsongo Kasereka, 54 ans
Il vient de la région troublée de l’Est du Pays. Il avait déjà une formation et une longue expérience d’aumônier d’hôpital. Et pourtant il saisit toute occasion pour expérimenter ou se transformer.
Nous espérons organiser 4 CPT entre juin 2013 et mars 2014, à Goma, Kisangani et Kinshasa. Chaque fois deux d’entre eux co-animeront avec un des trois superviseurs accrédités.
Voici quelques pépites d’or glanées dans le champ de notre dernier échange :
- Je peux dorénavant demeurer en silence dans un entretien, tout en étant très actif et présent aux autres, au processus, à moi-même.
- C’est seulement ici (au CPT) que vous pouvez être vous-même le matériel d’apprentissage. J’ai expérimenté que « toi aussi tu peux ! ». C’est bouleversant.
- Ce terrain d’initiation me fait découvrir le «regard vers l’intérieur» (comme Dieu regarde au cœur). Dans l’église on se contente du regard extérieur. Je découvre qui je suis, l’état de mon âme, et de celle du vis-à-vis ; ainsi je peux l’accompagner.
- La pratique précède la théorie. J’apprends mieux à partir de mes échecs, je découvre la beauté de mes brisures. Ça casse l’orgueil, remet tout à zéro, comme un tohu-bohu initial. Ça révolte les nouveaux venus ; mais cette résistance elle-même devient un instrument d’apprentissage.
- Quand j’ai mal supervisé, vous m’avez tous aidé à nommer mes faiblesses et vous les avez valorisées : il est possible de les transformer en nouvelles capacités.
- J’avais des doutes, j’étais inquiet de me risquer devant ceux qui devaient m’évaluer à la fin. Mais j’ai mis en œuvre ma découverte, le triangle de la confiance…en moi-même, en Dieu, aux autres.
- Dans ce parcours méthodologique, j’ai appris à nager. Ça casse nos prétentions à connaître (par les 2 CPT)
- La mise en œuvre d’un moi-responsable va de pair avec l’attention au groupe et la tâche de facilitateur.
- Le champ est grand, il ne suffit pas de vous copier. La pratique me fait accoucher de capacités nouvelles.
- J’apprends à prendre le risque de négocier ; je peux dépasser la faiblesse d’obéir seulement à l’autorité. Vous m’avez offert un cadre où nous pouvons devenir frères.
- Le CPT m’a fait rentrer en moi-même… et m’a permis de m’ouvrir.
- Nos chocs mutuels nous ont rapprochés.
- Je me suis vu comme un matériel didactique. J’ai appris à m’exposer.
Grâce, un nom prédestiné !
Grâce, c’est est le nom d'une jeune fille de 17 ans hospitalisée actuellement aux Cliniques Universitaires de Kinshasa. C’est son histoire que je veux raconter, car son nom est en quelque sorte le sujet de sa vie. J’écris ce témoignage et publie sa photo avec l'accord explicite de Grâce elle-même.
Lors de la première visite de Grâce par le stagiaire cpt N, il reçoit un choc à la découverte de cette jeune personne au visage défiguré et humilié. Après un vif combat intérieur N. se décide alors de travailler justement dans ce pavillon-là, celui de la chirurgie plastique: il tenait vraiment à y aller. Il était prêt à visiter des patients dans un tel état, bien qu’il soit fortement choqué. Le visage de Grâce est effrayant à voir, presque deux fois plus long qu'un visage normal. Ses deux joues et sa mâchoire sont fortement enflées, sa bouche ne peut se fermer, les dents de mâchoire inférieure lui manquent. Tourmentée, elle est allongée sur son lit d'hôpital. Mais elle peut parler et elle raconte !
A l'âge de onze ans Grâce est tombée malade d'une inflammation de la mâchoire. Par deux fois on a tenté une intervention chirurgicale, mais malheureusement sans succès. Au contraire après la deuxième opération, des saignements ont commencé qui ont interdit toute intervention ultérieure. C'est ainsi que la mâchoire de Grâce n'a cessé de grandir et de se déformer.
Le diagnostique actuel, c’est qu’on ne sait pas quoi faire pour elle à Kinshasa. Quelle déception terrible pour Grâce ! Elle est désespérée et pleure presque jour et nuit. Elle a réalisé que ce constat est comme une condamnation à mort. En effet, même les cliniques universitaires ne savent plus quoi faire avec elle ; c’est bouleversant !
Peu de temps avant le début de la session cpt, N avait reçu la visite d'un frère venant de Lubumbashi. Ce visiteur parlait avec beaucoup d'émotion de la guérison de son épouse qui avait souffert d'une inflammation de la mâchoire. Cette inflammation ressemblait très précisément à celle de Grâce! Cette femme-là avait pu être sauvée par une intervention chirurgicale dans une clinique spécialisée à Milan. Et maintenant, voici que N se trouve face à Grâce avec un même diagnostique! Il ne peut faire autrement que de lui raconter cette histoire qu'il venait de vivre ! C'est alors que Grâce – elle aussi – lui parle des efforts de sa grand mère pour l’emmener dans une clinique spécialisée à Milan. Mais des obstacles se présentent encore : Des employés spéciaux de l'ambassade d'Italie doivent venir aux cliniques pour juger du cas de Grâce. La démarche finit avec un accord de l'ambassade italienne pour l’octroi d’un visa !
Depuis, une série de semaines se sont passées. Attendre, c’est le grand défi pour elle. Elle est tourmentée par cette question: où trouver les finances pour ce vol et pour l’opération à Milan? Est-ce que sa grand-mère pourra trouver plusieurs milliers de dollars pour assurer ce déplacement et l'intervention? N est là, présent auprès de Grâce. Il lui dit: « Grâce, tu es belle! ». Et il le dit et le dit toujours à nouveau pour nourrir son feu intérieur d'espoir et d'attente : Vivre et devenir belle un jour!
Lors de la première visite de Grâce par le stagiaire cpt N, il reçoit un choc à la découverte de cette jeune personne au visage défiguré et humilié. Après un vif combat intérieur N. se décide alors de travailler justement dans ce pavillon-là, celui de la chirurgie plastique: il tenait vraiment à y aller. Il était prêt à visiter des patients dans un tel état, bien qu’il soit fortement choqué. Le visage de Grâce est effrayant à voir, presque deux fois plus long qu'un visage normal. Ses deux joues et sa mâchoire sont fortement enflées, sa bouche ne peut se fermer, les dents de mâchoire inférieure lui manquent. Tourmentée, elle est allongée sur son lit d'hôpital. Mais elle peut parler et elle raconte !
A l'âge de onze ans Grâce est tombée malade d'une inflammation de la mâchoire. Par deux fois on a tenté une intervention chirurgicale, mais malheureusement sans succès. Au contraire après la deuxième opération, des saignements ont commencé qui ont interdit toute intervention ultérieure. C'est ainsi que la mâchoire de Grâce n'a cessé de grandir et de se déformer.
Le diagnostique actuel, c’est qu’on ne sait pas quoi faire pour elle à Kinshasa. Quelle déception terrible pour Grâce ! Elle est désespérée et pleure presque jour et nuit. Elle a réalisé que ce constat est comme une condamnation à mort. En effet, même les cliniques universitaires ne savent plus quoi faire avec elle ; c’est bouleversant !
Peu de temps avant le début de la session cpt, N avait reçu la visite d'un frère venant de Lubumbashi. Ce visiteur parlait avec beaucoup d'émotion de la guérison de son épouse qui avait souffert d'une inflammation de la mâchoire. Cette inflammation ressemblait très précisément à celle de Grâce! Cette femme-là avait pu être sauvée par une intervention chirurgicale dans une clinique spécialisée à Milan. Et maintenant, voici que N se trouve face à Grâce avec un même diagnostique! Il ne peut faire autrement que de lui raconter cette histoire qu'il venait de vivre ! C'est alors que Grâce – elle aussi – lui parle des efforts de sa grand mère pour l’emmener dans une clinique spécialisée à Milan. Mais des obstacles se présentent encore : Des employés spéciaux de l'ambassade d'Italie doivent venir aux cliniques pour juger du cas de Grâce. La démarche finit avec un accord de l'ambassade italienne pour l’octroi d’un visa !
Depuis, une série de semaines se sont passées. Attendre, c’est le grand défi pour elle. Elle est tourmentée par cette question: où trouver les finances pour ce vol et pour l’opération à Milan? Est-ce que sa grand-mère pourra trouver plusieurs milliers de dollars pour assurer ce déplacement et l'intervention? N est là, présent auprès de Grâce. Il lui dit: « Grâce, tu es belle! ». Et il le dit et le dit toujours à nouveau pour nourrir son feu intérieur d'espoir et d'attente : Vivre et devenir belle un jour!
Journée festive d’accréditation :
un pas décisif
Passer la souris sur les images pour plus d'informations
Ambiance de fête, même la presse et la tv sont de la partie.
Une étape capitale vient d’être franchie en ce lundi 24 septembre, à la fin du cours CPT de 5 semaines et juste avant le cours de méthodologie pour les futurs formateurs : Ambiance de fête, même la presse et la tv sont de la partie.
Au matin, l’initiateur du Projet de formation pastorale clinique en RDC, le pasteur Alfred Mbuta passe son entretien d’accréditation comme formateur – superviseur pastoral, après tout un cursus de formation, vécu au pas de charge et avec beaucoup d’intensité et de compétence.
Cet entretien se déroule à « huis clos » (très approximatif) !) avec les trois vis-à-vis spécialistes que sont les deux formateurs suisses, ainsi que le prof. de psychologie et thérapeute André Masiala ma solo engagé dans le processus. Après concertation, l’accréditation est proclamée avec solennité.
Dans l’après-midi, une grande fête vient célébrer cet événement d’accréditation : 150 à 200 personnes se pressent dans la salle de la présidence nationale de l’ECC, y compris des chorales de la paroisse du Pasteur Mbuta, en présence de la presse et de plusieurs chaînes de télévision. Des invités de marque (recteur de l’université, Mgr Ngoyi ; président du synode national Mgr Mbaya, …) prennent la parole, pour souligner l’importance de l’événement . On saisit l’occasion pour donner les attestations aux 16 stagiaires qui viennent d’achever leur CPT.
Avec l’accréditation du premier formateur cpt au Congo s’ouvre un nouveau champ, celui de la formation d’une équipe porteuse de tout le projet. En fait sept autres pasteurs et un prêtre, après avoir vécu deux cpt de base, entrent dès le lendemain dans un 2ème processus de formation, celui de superviseurs- formateurs. Nous espérons qu’il les conduira dans quelques années à la même accréditation. Nous vivons avec eux ces 15 jours de formation méthodologique avec beaucoup d’enthousiasme et le sens d’être porté par une grande vision.
A l’arrière-fond se dessinent bien sûr, tous les patients qui pourront être rencontrés et accompagnés dans l’esprit du Christ, dans l’avenir, mais aussi les hôpitaux qui recevront un élargissement important de leur compétence par l’intégration d’aumôniers qualifiés, dans leurs services ; sans compter l’impact que ces pasteurs pourront avoir auprès de leurs paroisses respectives et dans l’accompagnement de leurs collègues par la supervision pastorale.
La formation pastorale clinique : quel impact ?
( Un regard rétrospectif des stagiaires de 2011, après un an)
La réponse à l’enquête sur l’impact du CPT adressée aux stagiaires de l’an passé (2011) a été enthousiaste et spontanée. Le constat le plus fréquent consiste dans la découverte étonnée de la multiplicité des domaines où cette formation produit du fruit. Au premier plan se situe une nouvelle posture à l’égard de l’être humain, et la transformation manifeste d’une pratique pastorale auparavant sure d’elle-même en une attitude plus humble qui valorise l’humain, accueille et accompagne autrui. Il est devenu évident pour chacun que tout être humain, en particulier les plus démunis ont besoin en premier lieu de compréhension, de sensibilité, d’estime et d’aide à clarifier sa situation. L’attitude non-directive de la tradition cpt en a fait un fondement : « J’ai renoncé é vouloir dominer ». Et pour parvenir à cette attitude il faut aller à la rencontre de ses propres zones d’ombre, défauts et faiblesses.De nombreux témoignages évoquent de manière claire et joyeuse une nouvelle estime de soi , une nouvelle fermeté du moi. C’est encourageant d’observer combien la découverte de ses propres forces, facultés et clartés conduit à plus de satisfaction personnelle. Il est souvent question d'un large développement des sentiments, pensées, visions et conceptions. En fait, une nouvelle conscience de soi, de nouvelles capacités d'action et motivations apparaissent chez les stagiaires. La supervision est vécue comme le modèle de l'accompagnement.
Ils jettent un regard neuf et stimulant sur leur entourage proche et lointain. Par exemple, ils mesurent les multiples opportunités suscitées par la mise en œuvre à venir de services d’aumônerie dans les hôpitaux ; non seulement par l’accompagnement direct des patients, mais aussi par les interactions avec les autres départements et services de santé. Beaucoup d’entre eux en attendent même une amélioration de la qualité de vie et des relations interpersonnelles au sein de la communauté. Ainsi on peut lire dans l'un des rapports : « L’attention aux autres modifie la conscience de soi et nous transforme nous-mêmes » Les personnes se sentent moins laissées à elles-mêmes et trouvent plus de sécurité entre elles.
Les conséquences à plus long terme pour l'ensemble du pays sont aussi évoquées : « Notre pays est malade, nous avons besoin d'hommes et de femmes fiables, dotés de force et d'assurance. ». On trouve d’ailleurs les mêmes accents dans un nouveau programme du gouvernement, intitulé « nouvelle citoyenneté », qui souligne l'importance de la solidité personnelle. Le Congo ressent un besoin intense d'améliorer les conditions de vie dans tous les domaines.
Du rapport de chaque ex-stagiaire émane une vive reconnaissance à l'égard de ceux (paroisses, fondations et personnes privées) qui, par leurs dons, ont permis de lancer cette formation pastorale clinique au Congo RDC. Nos participants réfléchissent maintenant sérieusement à la mobilisation de moyens financiers en vue d'élargir cette cause. Ils commencent en effet à faire confiance à leurs propres possibilités. Ils envisagent le renouvellement de la pastorale, non seulement dans le monde de la santé et des paroisses, mais aussi dans les prisons, les écoles, les services sociaux, et plus loin encore...
Kinshasa, le 6 septembre 2012/Klaus Völlmin/trad. jc+mj
Premiers contacts avec les Cliniques Universitaires de Kinshasa
Lundi soir 20 août
Après deux jours d’introduction au CPT, dans un lieu idyllique et complétement isolé (le monastère de l’Assomption des Prémontrés, atteignable en 4x4, à travers un chemin creux et ensablé), nous voici engagés dans ce premier jour de la session, avec la prise de contact avec les Cliniques universitaires
Contrairement à certains hôpitaux visités jusqu’à présent, celles-ci donnent l’impression d’être bien tenues ; on y travaille effectivement, même assidûment, les chambres sont propres, les lits remplis, les patients soignés. Ici, c’est du sérieux! Ça nous réjouit.
Vendredi passé, au premier jour d’introduction, nous avons invité - convoqué les chefs de départements (médecins), les chefs de pavillons (infirmiers) et l’administration à venir participer à notre cérémonie d’ouverture dans l’hôpital, où nous expliquons notre démarche de formation et notre concept d’aumônerie. Mais quasiment personne n’est venu ; nous étions décontenancés et découragés. Seul le secrétaire aux relations publiques arrive in extremis, envoyé par la Direction. Il écoute attentivement notre discours en présence des formateurs et des stagiaires-aumôniers ; il se laisse rejoindre par notre perspective, après avoir été très sceptique. Puis il nous ouvre le champ et nous fait visiter (presqu’avec zèle) tous les pavillons, avec introduction auprès de certains chefs, présentation de certaines chambres de malades. Ouf, nous sommes soulagés, le travail pratique si fondamental pourra se faire.
Ce lundi après-midi, les stagiaires se dispersent dans les différents pavillons qu’ils se sont répartis, puis nous allons (les trois formateurs) rencontrer la Directrice du nursing. Celle-ci nous reçoit très froidement et donne des signes de vouloir empêcher tout le processus. Elle réclame la copie de la lettre de la Direction en réponse à notre demande qui nous donnerait l’autorisation de principe. Mais cette lettre n’existe pas, l’autorisation avait été donnée oralement. Suspicion. Nous utilisons alors tout notre art de l’écoute et de la communication pour la convaincre de la pertinence de notre démarche. Ça dure. C’est dur. Mais les traits s’assouplissent les sourires apparaissent, on se détend ; c’est gagné. Non seulement nous avons pu montrer patte blanche, mais elle nous demande pourquoi nous n’avons pas organisé de telles formations avant ; c’est cela dont ils ont besoin, etc, etc. Il faut dire qu’ils ont à faire à rude épreuve avec les innombrables prêcheurs de tout crin qui sévissent dans leurs corridors, qui crient et qui prient à tour de bras, autant les catholiques qui font leur « apostolat » que des pentecôtistes de toutes sortes qui « les embêtent et handicapent leur travail ». A l’issue de l’entretien, elle nous accompagne en signe de reconnaissance jusqu’à l’issue de l’hôpital.
Entre temps, dans un des pavillons (pédiatrie) nos stagiaires sont en butte à un refus net du secrétaire du pavillon de les laisser faire leur travail. Ils téléphonent à Alfred Mbuta qui reçoit l’appel pendant l’entretien avec la Directrice du nursing. On en était encore dans la phase de suspicion. L’atmosphère s’assombrit. Arrive alors le secrétaire des relations publiques qui nous avait introduits partout, trois jours avant. Il se réfère à la Direction… Après la détente, la
Directrice l’envoie « mettre de l’ordre » en pédiatrie. Nous apprenons après, qu’à son arrivée, le secrétaire du pavillon voulait encore s’opposer ; mais le médecin chef du département le remet à l’ordre en ayant capté après quelques phrases des stagiaires qu’il s’agissait de « quelque chose de sérieux et de tout à fait intéressant ». Il s’en suit un entretien chaleureux de ¾ d’h entre le stagiaire et le médecin (avec un prochain rendez-vous à la clé). «Vous faites un travail complémentaire au nôtre et tout à fait nécessaire, c’est cela qu’il nous faut, etc, etc».
Il faut préciser que le stagiaire en question a capté la différence et les enjeux en quelques heures de sessions; il a vu que c’était du travail de «pro», il a été touché dans ses tripes lors du récit de vie d’un autre, il a été saisi par l’accueil, la paix des lieux, du groupe… et il est devenu presque en un clin d’œil témoin «d’une autre manière d’approcher la souffrance, la rencontre et l’accompagnement».
Je profite de saluer chacun de vous cordialement,
Après deux jours d’introduction au CPT, dans un lieu idyllique et complétement isolé (le monastère de l’Assomption des Prémontrés, atteignable en 4x4, à travers un chemin creux et ensablé), nous voici engagés dans ce premier jour de la session, avec la prise de contact avec les Cliniques universitaires
Contrairement à certains hôpitaux visités jusqu’à présent, celles-ci donnent l’impression d’être bien tenues ; on y travaille effectivement, même assidûment, les chambres sont propres, les lits remplis, les patients soignés. Ici, c’est du sérieux! Ça nous réjouit.
Vendredi passé, au premier jour d’introduction, nous avons invité - convoqué les chefs de départements (médecins), les chefs de pavillons (infirmiers) et l’administration à venir participer à notre cérémonie d’ouverture dans l’hôpital, où nous expliquons notre démarche de formation et notre concept d’aumônerie. Mais quasiment personne n’est venu ; nous étions décontenancés et découragés. Seul le secrétaire aux relations publiques arrive in extremis, envoyé par la Direction. Il écoute attentivement notre discours en présence des formateurs et des stagiaires-aumôniers ; il se laisse rejoindre par notre perspective, après avoir été très sceptique. Puis il nous ouvre le champ et nous fait visiter (presqu’avec zèle) tous les pavillons, avec introduction auprès de certains chefs, présentation de certaines chambres de malades. Ouf, nous sommes soulagés, le travail pratique si fondamental pourra se faire.
Ce lundi après-midi, les stagiaires se dispersent dans les différents pavillons qu’ils se sont répartis, puis nous allons (les trois formateurs) rencontrer la Directrice du nursing. Celle-ci nous reçoit très froidement et donne des signes de vouloir empêcher tout le processus. Elle réclame la copie de la lettre de la Direction en réponse à notre demande qui nous donnerait l’autorisation de principe. Mais cette lettre n’existe pas, l’autorisation avait été donnée oralement. Suspicion. Nous utilisons alors tout notre art de l’écoute et de la communication pour la convaincre de la pertinence de notre démarche. Ça dure. C’est dur. Mais les traits s’assouplissent les sourires apparaissent, on se détend ; c’est gagné. Non seulement nous avons pu montrer patte blanche, mais elle nous demande pourquoi nous n’avons pas organisé de telles formations avant ; c’est cela dont ils ont besoin, etc, etc. Il faut dire qu’ils ont à faire à rude épreuve avec les innombrables prêcheurs de tout crin qui sévissent dans leurs corridors, qui crient et qui prient à tour de bras, autant les catholiques qui font leur « apostolat » que des pentecôtistes de toutes sortes qui « les embêtent et handicapent leur travail ». A l’issue de l’entretien, elle nous accompagne en signe de reconnaissance jusqu’à l’issue de l’hôpital.
Entre temps, dans un des pavillons (pédiatrie) nos stagiaires sont en butte à un refus net du secrétaire du pavillon de les laisser faire leur travail. Ils téléphonent à Alfred Mbuta qui reçoit l’appel pendant l’entretien avec la Directrice du nursing. On en était encore dans la phase de suspicion. L’atmosphère s’assombrit. Arrive alors le secrétaire des relations publiques qui nous avait introduits partout, trois jours avant. Il se réfère à la Direction… Après la détente, la
Il faut préciser que le stagiaire en question a capté la différence et les enjeux en quelques heures de sessions; il a vu que c’était du travail de «pro», il a été touché dans ses tripes lors du récit de vie d’un autre, il a été saisi par l’accueil, la paix des lieux, du groupe… et il est devenu presque en un clin d’œil témoin «d’une autre manière d’approcher la souffrance, la rencontre et l’accompagnement».
Jean-Claude Schwab
Photos: Le chemin d'approche du monastère ensablé, le cloître du monastère où s'est tenue l'introduction aux cours, les couloirs de la clinique universitaire propres en ordre, la visite guidée des cliniques, premiers contacts avec les patients, en sortant de la visite aux cliniques universitaires
Formation d'aumôniers d'hôpitaux en Afrique francophone (RDC)
Contenu:Situation
Les personnes malades, séjournant dans les hôpitaux de RDC représentent une des populations les plus fragiles et démunies du pays. Leur prise en charge médicale se fait le mieux possible; mais l'accompagnement des malades dans une perspective globale, spirituelle, sociale et personnelle est en général déficient. La plupart des quelques aumôniers actifs ne sont pas formés pour cette tâche spécifique. Les églises (protestante, catholique, et kimbanguiste) de RDC commencent à s'en préoccuper, et découvrent qu'il existe une formation clinique et pastorale (CPT, clinical pastoral training) adaptée à ce besoin, dans de nombreux pays et continents.
--> Le fruit de ces formations consiste
- en des compétences spécifiques dans l'accompagnement spirituel et humain,
- en une capacité profonde et simultanée d'écoute d'autrui (des malades) et de la parole de Dieu,
- dans la dimension œcuménique des aumôneries d'hôpitaux,
- ainsi qu'en des équipes de soins pluridisciplinaires qui intègrent ces aumôniers dans la prises en charge globale des malades.
Origine
La Fédération des églises protestantes du Congo (ECC, Eglise du Christ au Congo) a mandaté le pasteur Alfred Mbuta, pour répondre à ce besoin de formation spécifique. Celui-ci a contacté l'aumônerie du CHUV à Lausanne, en 2008 pour une aide logistique. L'Association suisse romande de supervision pastorale, (www.supervision-pastorale.ch) a été saisie de la demande et m'a mandaté pour répondre à cette demande, en tant que superviseur pastoral accrédité.
Début
Avec un collègue superviseur suisse allemand, Klaus Völlmin, (voir l'équivalent suisse alémanique sous www.aws-seelsorge.ch/cpt/index.html) nous nous sommes alors attelés à établir une filière de formation pastorale à l'Ecoute et à la Communication en Afrique francophone, au Congo-Kinshasa. Ainsi un premier cours CPT expérimental de 6 semaines a pu être organisé en 2010, à l'Hôpital Général de Kinshasa, pour 10 pasteurs. Il s'agissait pour nous de tester cette formule sur place, de vérifier sa pertinence et son adéquation à la culture et aux besoins locaux, avant d'élaborer la suite du projet. La réponse enthousiaste de tous les acteurs nous a conduits à poursuivre l'entreprise, en l'adaptant en fonction des expériences faites.
En 2011, un 2ème stage CPT de 4 semaines résidentielles à Kinshasa est organisé en lien avec un autre hôpital civil, de septembre à octobre, à trois formateurs, avec le pasteur Mbuta. Ce cours a réuni 16 stagiaires extrêmement motivés, provenant des 4 coins du pays (déplacements en avion). Il a été marqué par la qualité des personnes qui l’ont suivi, par la force de leur motivation et de leur engagement dans ce processus très dense et exigeant, tous engagés dans une pastorale d’accompagnement.
Ils ont fait la découverte étonnée et l'expérience bouleversante d'une manière radicalement autre d'accompagner spirituellement et professionnellement. C'est une spiritualité incarnée et intégrale - intégrée qui est véhiculée par cette approche CPT, et nos collègues de RDC en ressentent le grand besoin. Non seulement pour les aumôneries d'hôpitaux, mais aussi pour l'accompagnement pastoral et spirituel des pasteurs et des prêtres.
Projet 2012-2015
En 2012, avec l'Eglise du Christ au Congo (=protestants), nous animerons un 3ème cours CPT en août- septembre pour 18 participants. Quelques-uns d'entre eux pourront ensuite suivre 10 jours de session méthodologique, en octobre en vue d'entrer en formation de superviseurs (formateurs). Ils pourront ensuite co-animer d'autres cours à travers le pays.
En 2013 nous envisageons trois cours cpt: à Kisangani (au cœur de la forêt équatoriale), à Goma (région des Grands Lacs), à Kinshasa. Le besoin et les demandes affluent de toutes parts!
De même en 2014 et 2015: trois cours par an.
Nous espérons que 7 à 10 candidats superviseurs - formateurs auront pu être accrédités en 2015, et pourront ainsi assumer dès lors eux-mêmes la suite de l'entreprise de formations des aumôniers. Autant Klaus Völlmin que moi, nous avons atteint nos 70 ans et percevons l'appel à ne pas tarder dans la mise en œuvre de ces projets!
Financement
En 2010 et 2011, nous avons bénéficié de l'aide de Pain pour le Prochain (PPP) au départ, puis de deux fondations (Champ-Soleil à Lausanne et Appui Catholique à la cure d'âme de l'université de Lucerne) ainsi que d'une dizaine de paroisses romandes et alémaniques, de l'aumônerie œcuménique de l'Hôpital universitaire de Zurich, de l'Association romande de supervision pastorale, ainsi que de nombreuses personnes individuelles; et bien sûr des contributions personnelles des stagiaires sur place. Et nous avons renoncé évidemment à tout salaire. Cela nous a permis de couvrir les frais, à raison de $ 26'000 en 2010, et $ 42'000 en 2011. En 2012, le budget s'élève à $ 26'000. En 2013, nous évaluons le coût des trois cours CPT à $ 75'000.
L'enjeu est de taille dans ce sous-continent qui compte plus de 500 hôpitaux principaux ! Jusqu'à présent, c'est la première formation spécifique pour des aumôniers auprès des malades en Afrique francophone.
le 29 juillet 2012
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